Un ministre « made in Vourey »

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La culture du chanvre à Vourey…
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Les pierres blanches
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Les pierres blanches
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Joseph Paganon naquît à Vourey le 19 mars 1880, au hameau de Sanissard, où ses parents Alexandre Joseph Paganon et Marie Rambaud étaient instituteurs. Originaires de Laval, ils avaient été déplacés dans notre commune pour des raisons politiques parce qu’ils appartenaient au parti radical.

Une Formation de Chimiste et Ingénieur

Premier du canton au certificat d’études, il fait ses études secondaires à Grenoble, puis ses études supérieures à Lyon, où il sort lauréat de l’Ecole de Physique et de Chimie, et devient ingénieur aux usines Poulenc. Remarqué par ses qualités intellectuelles, il obtient en 1905 un bourse de voyage du ministère du commerce et de l’industrie pour des études sur la soie artificielle de l’industrie chimique en Allemagne.

A son retour en 1906, le ministre de l’agriculture, Mr Pams, le prend comme chef de cabinet. En 1908, à l’âge de 28 ans, il est nommé le plus jeune conseiller au Commerce Extérieur de France. En 1913, il repart au titre du ministre de l’agriculture, en mission en Allemagne et en Autriche sur l’alimentation en lait des grandes villes et la lutte contre la tuberculose.

Cette même année 1913, il fait une autre mission en Allemagne au titre du ministre du commerce sur les trusts, cartels et syndicats et sur l’organisation des ports de Brême et Hambourg. En 1914, nouvelle mission en Allemagne et en Autriche au titre du gouverneur général de l’Algérie sur les débouchés des produits agricoles de nos colonies dans ces pays.

Au titre de ses missions, il reçut les distinctions d’Officier d’Académie et du Mérite Agricole en 1913. Il collabora aussi à divers journaux et revues sur les questions économiques et sociales (Le Temps, Le Progrès de Lyon, etc…).

Un Chimiste au service de la patrie

Pendant la guerre de 1914 – 1918, ses services rendus sont si remarquables que Georges Clémenceau en fait son attaché militaire en 1917. Accompagnant « le Tigre » sur le front et dans les tranchées, Joseph Paganon fut surnommé « L’Ombre du Père-La-Victoire ».

Il se marie le 29 décembre 1915 à Paris 17ème avec Madame Gabrielle Isabelle Marie Gabil. Il est nommé Chevalier de la Légion d’Honneur par décret du 31 mai 1919. Sans doute peu motivé par les honneurs, pour la remise de sa décoration, il est relancé par la chancellerie les 20 août, 18 octobre et 18 décembre 1919. Le 3 mars 1920, le grand chancelier écrit au ministre du travail pour le faire presser, et sa décoration lui est finalement remise le 19 mars 1920 par Mr Armand Prosper Marchand, général de division et Grand Officier de la Légion d’Honneur.

Son dossier détaille ses services rendus à la nation de manière suivante :
« a fait preuve dans les diverses fonctions et missions dont il a été successivement chargé d’une haute conception du devoir. Esprit très éclairé, a apporté une collaboration des plus précieuses aux ministères de l’armement et des fabrications de guerre, de l’agriculture et plus particulièrement du travail et de la prévoyance sociale dans l’étude des questions ouvrières et sociales. A contribué avec une rare compétence et un grand dévouement à la répartition de la main d’œuvre militaire et civile ainsi qu’à l’organisation du placement. »

Une Entrée en Politique

En 1920, il est élu maire de Laval puis conseiller général du canton de Goncelin en 1925.
En 1924, lorsque le cartel des gauches triomphe en Isère, il est élu député radical de l’Isère, mandat qu’il occupera jusqu’en 1935. A ce poste, il aura comme préoccupation constante le désenclavement du Grésivaudan, de Belledonne et de l’Oisans.
Il entre plus tard dans le cabinet d’Edouard Herriot, comme sous-secrétaire d’Etat aux Affaires Etrangères, de juin à décembre 1932.

D’octobre 1932 a 1935, il s’installe dans le fauteuil de ministre des travaux publics. Il réorganise le réseau routier, classant 40 000 kilomètres de routes dans le réseau national. Il fait engager les travaux des barrages du Chambon et du Sautet et, en Isère, obtient des crédits pour la création et l’amélioration des routes touristiques, les accès à l’Alpe d’Huez, au Villard-Notre-Dame et la liaison d’Uriage à Allevard dite « route du Balcon de Belledonne ».

Dans ses différentes fonctions, il œuvra pour le développement touristique du Dauphiné en créant, avec Léon Perrier, la station de sports d’hiver de l’Alpe d’Huez, en améliorant les liaisons ferroviaires à destination de Grenoble et en faisant creuser des tunnels.

Cet appétit de travaux de désenclavement de notre région fera dire au président du conseil, Edouard Daladier, à la tribune de l’Assemblée Nationale : « Mais il nous ruine ! Il veut nous ruiner! »

Et Joseph Paganon de répondre :  » Non. Avec ces réalisations, j’enrichis la France ! »
Il avait raison, mais il avait raison trop tôt.

De juin 1935 au 24 janvier 1936, il occupe le fauteuil de ministre de l’intérieur dans le gouvernement de Pierre Laval. On loue sa souplesse, sa patience et son habileté déployées au cours des manifestations de rue. En 1936, les radicaux quittent le gouvernement et il se fait élire sénateur de l’Isère et conseiller général du canton de Goncelin.

En 1937, alors que les gouvernements se succèdent de crise en crise, on veut le nommer sénateur de l’Isère ministre d’Etat chargé de la réforme constitutionnelle. S’il réussit sa mission, il a le pied à l’étrier pour accéder à la tête de l’ Etat…

Mais le destin en décide autrement…

Malade, atteint d’un cancer, il vit défiler à son chevet les plus importantes personnalités de son époque : le professeur Mondor, de l’institut, qui lui prodigua des soins, Léon Blum, Albert Lebrun, Edouard Herriot, Edouard Daladier, Chautemps, Tardieu, Vaillant-Couturier, Marcel Cachin, Sacha Guitry, Elvire Popesco, Marie Marquet.
Joseph Paganon est mort à Paris, le 1er novembre 1937.

L’académicien André François-Poncet dira de lui :  » Paganon était un charmeur, doué d’une intelligence et d’une sensibilité si aiguës, qu’elles pénétraient jusqu’à la racine des choses et jusqu’au fond des hommes. »

texte extrait du livre « Histoire et histoires de Vourey », par Les Compagnons de Volvredo